Les habitants du département du Puy-de-Dôme ont été "choisis" par Enedis pour subir une expérimentation de réduction de la puissance électrique disponible dans leur habitation d’ici fin mars.
Cette limitation de puissance est imposée à distance aux seuls détenteurs d'un Linky, sans contact physique et instantanément !
La puissance disponible pourrait passer à 3 000 watts, contre 6 000 à 12 000 watts garantis par leurs contrats. Ce qui pourrait les priver de chauffage, d'eau chaude ... lors du test (pendant deux heures ?).
D'après le directeur d'Enedis, pourraient continuer à fonctionner un frigo, un congélateur, une box Internet, un ordinateur, de l’éclairage, une télévision (total 2 000 watts). Resterait 1 000 watts pour un appareil de forte puissance, comme UNE plaque électrique OU UN radiateur, mais pas de four, lave-linge, sèche-linge, lave-vaisselle...
Environ 150 000 abonnés pourraient être concernés, sur les 300 000 du territoire. Ils seraient prévenus à l’avance (5 jours avant, par courrier, mail ou SMS) ... Mais il est dit que seuls les particuliers sont concernés (pas les entreprises, même dans les bureaux et les magasins, ou les agriculteurs, surtout en ce moment...), et pas ceux "à hauts risques vitaux" (par exemple les personnes sous respirateurs, s'ils sont déclarés auprès d'Enedis).
Généreusement, Enedis rétribuera les "cobayes" avec une "prime" de 10 €...
Pourquoi eux ?
D'après le directeur d'Enedis Auvergne : parce que ce territoire est à la fois urbain et rural, avec différents types de puissance utilisées, parce qu’il peut y faire froid...
Ou parce que, vu de Paris, ils seraient censés être moins réactifs ? Ils peuvent se tromper...
Comment s'y opposer ?
Robin des toits rappelle que le décret du 29/12/2023 qui l’organise prévoit dans son article 3 que nous puissions refuser d’être cobayes :
"Ce refus est adressé au gestionnaire du réseau de distribution au moyen d'un formulaire [en ligne], dans un délai de 15 jours ouvrables après envoi du courrier par le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité."
On peut le faire par tél (au 0 800 730 941) ou sur le site (https://s.dial-once.com/fGY1w7DFtA), JUSQU'AU 29 janvier 2024 inclus, en indiquant :
- son numéro de PDL (Point de Livraison, 14 chiffres visible sur votre compteur électronique ou Linky ou sur votre facture) :
- son numéro de téléphone mobile, ou votre adresse email.
Le LINKY comme outil du rationnement décidé par le pouvoir, outil de surveillance...
C'est donc le test d'une technique de rationnement pilotée à distance ("grâce au Linky"), appelée à être utilisée partout sur le territoire français.
Les durées pourraient être plus longues, les puissances disponibles plus faibles, tout cela étant décidé par les gestionnaires du réseau ou par une autorité politique selon leurs seules logiques.
On en a déjà une idée avec le système mis en place pour les foyers victimes de "précarité énergétique". Ceux-ci étaient protégés jusqu'au 1e avril 2022 de toute coupure en hiver par la "trève hivernale" (instaurée en 2013) qui interdisait de leur couper le courant du 1er novembre au 31 mars.
Soit disant pour mieux les protéger, a été instauré par un décret du 26 février 2023 la réduction à une alimentation minimale en électricité de 1 kVa en cas d’impayés (s'ils ont droit au Fonds de solidarité logement) ... et s'ils sont équipés d’un LINKY (car tout se fait à distance, instantanément).
Une consommation rationnée pour les pauvres : 1000 watts c'est sans chauffage, douches chaudes, cuisson au four, télé... Une lampe peut-être ?
Par ailleurs, on constate l'utilisation par les services administratifs des données issues du Linky pour contrôler les déclarations des usagers.
C'est notamment le cas pour France Travail (l'ex Pôle-Emploi). Le décret n° 2022-955 du 29 juin 2022 permet aux agents chargés de la prévention des fraudes d'obtenir auprès d’ENEDIS la communication des factures d'électricité des demandeurs d'emploi, pour visualiser leurs présences et leurs absences à leur domicile. Un contrôle implacable grâce au Linky qui permet une surveillance de la consommation en temps réel.
Cette surveillance de la consommation électrique instantanée est très invasive et pourrait très bien conduire à des dérives, en permettant par exemple à d'autres agents de l'État (comme la police) de savoir quand une habitation est occupée ou non, ainsi que le nombre de personnes présentes (ce qui pourrait par exemple compliquer la vie des sans-papiers et des hébergeurs solidaires qui les accueillent sous leurs toits).
Bien sûr, ce ne sont que des spéculations. Cela dit, ce qui est sûr c'est qu'une fois qu'un outil de surveillance est mis en place il est très facile de le généraliser et plus difficile de le retirer. D'où la nécessité de rester vigilants et critiques vis à vis de tous ces outils et de résister à leur imposition systématique !
« Dès le départ de la mise en place des Linky, nous évoquions ces risques de commande à distance de nos installations, d'exploitation de nos données personnelles... Nous étions alors traités de complotistes. On y est pourtant... » (StopLinky5GLoire)
Note : Pour bénéficier de l'assurance chômage française, il faut résider sur le territoire français. Les demandeurs d'emploi sont tenus d'informer France Travail dans un délai minimum de 3 jours avant leur départ s'ils ont l'intention de s'absenter plus de 7 jours. Ceux-ci n'ont le droit qu'à 35 jours maximum par an, s'ils dépassent ce nombre de jour ou ne déclarent pas leur absence ils se retrouvent dans l'illégalité vis-à-vis de France Travail. Le contrôle de leur présence ou de leur absence à domicile est donc présenté comme un moyen de lutter contre la fraude.
Cependant, comme nous l'avons déjà souligné dans de précédents articles sur Pôle Emploi, la plupart des supposées "fraudes" sont davantage le fruit d'erreurs de la part des allocataires, souvent mal informés, que le fruit d'une intention de "frauder". De plus, comme l'a critiqué Yann Gaudin, beaucoup de situations d'usagers ne permettent pas de se plier à cette exigence de Pôle Emploi vis à vis des absences (exemple : cas des intermittents du spectacles qui font régulièrement des déplacements pour leur travail), ce qui donne lieu à de nombreuses sanctions injustes à l'encontre des usagers.