En mars 2024, déjà, nous dénoncions le dispositif des Amendes Forfaitaires Délictuelles (AFD), dispositif dématérialisé très difficile à contester car uniquement administratif. Il a été très largement étendu par la loi LOPMI de janvier 2023. Il est très utilisé pour réprimer les manifestant.es, écologistes et autres, et vis à vis des jeunes banlieusards.
Leur usage systématisé vis à vis de certain.es, désignés dans le logiciel de main courante de la police comme les "indésirables" [appellation qui rappelle les pires heures du pétainisme], peuvent leur faire cumuler plusieurs dizaines de milliers d’€ de dettes qu'ils ne peuvent plus effacer et dont les remboursements partiels ponctionnent leurs très faibles revenus.
Déjà, Claire Hédon, défenseuse des droits, avait demandé le 30 mai 2023 la suppression de ce dispositif inique ou, au moins, son aménagement pour permettre de collecter le refus légal de ce dispositif par le plaignant (et le basculement dans un système d'amende classique, non numérique et plus facilement contestable). Sans aucune prise en compte par le pouvoir...
Une étude (voir ci-dessous, Amendes, évictions, contrôles : la gestion des "indésirables" par la police en région parisienne) soutenue par son institution vient de sortir, qui documente ces pratiques policières. Celles-ci ciblent "des jeunes hommes, racisés et précarisés, pour leur présence en groupe dans les espaces publics des quartiers où ils habitent, étudient ou travaillent". La plupart des contrôles ont lieu à moins de 500 mètres de leur domicile. Ce qui les condamne à la marginalisation dans l’économie informelle, voire illégale.
Incapables de payer les sommes dues, qui pèsent aussi sur leurs familles, ces jeunes subissent des majorations successives, des procédures de recouvrement et voient leurs premiers salaires saisis. Plus de 1 200 amendes forfaitaires délivrées dans ces quartiers ont été décortiquées. De son coté, la Défenseuse des droits est alertée sur ce phénomène de multiverbalisation "dans toutes [s]es rencontres avec les jeunes, que ce soit dans le nord de Paris, à Trappes ou à Marseille", sans doute ailleurs.
Une vidéo présentant des situations personnelles est accessible dans cet article du site Médiapart.
Le site marseillais Marsactu (repris dans Médiapart) rapporte la condamnation de deux policiers par le tribunal de Tarascon qui dressaient des amendes imaginaires, pour des faits d’usage de stupéfiants notamment. Ailleurs, ce sont des infractions sanitaires lors de la période covid, du tapage, le dépôt de déchets, des crachats, le non-port de gants à scooter... qui servent de justification à ces amendes, le plus souvent attribuées sans qu'aucun contact physique n'ait lieu entre le policier et le verbalisé, lequel reçoit quelques jours ou mois plus tard le PV, voire se voit directement prélevé l'argent sur son compte bancaire par le Trésor public...
Nos sources
Encore ado et 30 000 euros à payer : la police harcèle des jeunes des classes populaires (Basta!)
A Paris, la multiverbalisation des "indésirables", une politique "inutile et contre-productive" (Le Monde)
Éclairages - Amendes, évictions, contrôles : la gestion des "indésirables" par la police en région parisienne (Défenseur des droits)
Amendes à répétition : quand la police s’acharne sur les "indésirables" (Médiapart)
Deux policiers qui dressaient des amendes imaginaires condamnés par le tribunal de Tarascon (Marsactu)
"Amendes Forfaitaires Délictuelles" utilisées pour réprimer les pauvres, les opposant.es... (Halte au contrôle numérique)
Loi LOPMI : surveiller et punir (Halte au contrôle numérique)