Wauquiez, "ses" panneaux, "ses" investissements techno-sécuritaires

Nous avons déjà présenté deux projets de L. Wauquiez pour la région Auvergne-Rhône-Alpes : tous deux relèvent de la techno-sécurité, l'un pour les gares et TER de la région (Vidéosurveillance "augmentée" dans 129 gares d'Auvergne-Rhône-Alpes), l'autre pour les lycées (Reconnaissance faciale dans les lycées d'Auvergne-Rhône-Alpes ?).

Nous examinons ici la stratégie techno-sécuritaire régionale au niveau d'un territoire à travers l'exemple de Firminy et de la vallée de l'Ondaine.

Comme Christian Estrosi à Nice et plusieurs autres élu.es LR, L. Wauquiez développe une obsession électoraliste autour des technologies sécuritaires. Donc, quand il se déplace dans la région, il prétend arroser les communes, intercommunalités de fonds régionaux principalement dans ce domaine.

Ainsi à Firminy : la région vient en soutien au maire LR (élu en 2020) qui a privilégié le développement de sa police municipale en recrutant sept agents de plus (12 désormais), de nouveaux équipements dont un centre de supervision urbain (CSU) entièrement neuf et l'extension du réseau de caméras (désormais 140 caméras dans l’espace public ou dans les zones d’activités).

Celles-ci sont notament utilisées pour la vidéoverbalisation : "au lancement, on a constaté 27 feux rouges grillés en moins d’un mois."

Le grand paradoxe apparent de cette politique d'investissement dans les polices municipales est qu'il vise à compenser les baisses d'effectifs de la police nationale sous Nicolas Sarkozy (ministre de l'intérieur puis président LR, à l'époque des RGPP, révision générale des politiques publiques, quand un fonctionnaire sur deux partant à la retraite était non remplacé). Ce réinvestissement est cependant limité à la police, oubliant soignant.es, enseignant.es et autres fontionnaires...

Concrêtement, dans la circonscription de l’Ondaine, le nombre de policiers nationaux est passé d’environ 90  (d'après le syndicat Alliance, sans parler de la trentaine affectée à la protection de la résidence du préfet) à la fin des années 1990 à 59 réellement en place fin 2019.

L. Wauquiez est passé maître dans l'art de faire croire à des mannes régionales énormes alors que ces investissements sont le plus souvent une combinaison de différentes sources : parfois européennes (par exemple par l'ISF, Internal Security Fund ou Fonds européen pour la sécurité intérieure), beaucoup nationales mais aussi départementales, municipales ou liées à une communauté de communes.

Au niveau national, c'est principalement le rôle du Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), qui peut financer l'ensemble des actions de prévention de la délinquance par les collectivités territoriales, pas seulement les caméras mais aussi le financement d'agents chargés d'animation (notamment de rue, qui s'occupent aussi des sans-logis), d'encadrement de groupes... Si on privilégie les caméras et autres outils de surveillance, c'est donc directement au détriment des autres approches, plus sociales et éducatives.

Le pouvoir actuel privilégie les équipements techno-sécuritaires (caméras, CSU...) et veut réorienter idéologiquement ce fonds FIPD vers la "défense du pacte républicain" (délinquance, radicalisation, séparatisme, dérives sectaires). Par la loi LOPMI, il vient de tripler les subventions, avec des surdotations conjoncturelles (loi JO 2024...).

Les investissements proprement régionaux sont donc limités : par exemple à Firminy où sur 2,8 millions d'€ d’investissements, seuls 157 000 € le sont par la Région.

Mais l'enveloppe sécuritaire régionale a doublé depuis l’arrivée de Laurent Wauquiez fin 2015 !

10 000 caméras ont été déployées dans la région depuis 2016, dont 2300 couplées à de la VSA dans 129 gares.

Pour son second mandat, il a lancé un plan d’investissement de 300 millions d'euros (avec même le projet d’une brigade de sécurité régionale)...

Il a également mis en place des systèmes de vidéosurveillance et des portiques de sécurité dans 280 lycées et a annoncé que 4000 cars et scolaires et interurbains seront équipés de caméras (augmentées ?) d’ici 2028.

Laurent Wauquiez est récemment venu à Saint-Étienne pour donner une enveloppe de 45 millions d'euros supplémentaire par rapport au Contrat de Plan pour Saint-Étienne, dont une partie servira à renforcer la vidéosurveillance !

Sur ces 45 millions, 3 millions d’euros seront utilisés pour renforcer la police municipale et la police ferroviaire, et aussi pour installer 1000 caméras supplémentaires dans la ville !

Le projet des élu.es, et de la région qui les y encourage, est de développer une mutualisation intercommunale à l’échelle de toute la vallée de l’Ondaine, composée des communes de La Ricamarie, Le Chambon-Feugerolles, Çaloire, Saint-Paul-en-Cornillon, Saint-Maurice-en-Gourgois, Fraisses, Unieux (cette dernière refusant actuellement cette mutualisation).

Notamment, elle prévoit l'usage par toutes du CSU (centre de supervision urbain) implanté à Firminy. Ce type de pratique est porteur de grands dangers :

  • éloignement du contrôle policier qui en déshumanise et brutalise les effets (inverse d'une "police de proximité", favorisant la prévention)
  • ouverture à des techniques de plus en plus inquisitrices (il est facile de faire basculer un gros CSU vers la reconnaissance faciale pilotée par IA).
  • la loi Sécurité Globale (2021) autorise l'extension des dispositifs de vidéosurveillance jusqu'à l'échelle de départements. Il sera donc simple d'étendre son usage aux bourgs, hameaux voisins, jusqu'à mailler totalement tout le territoire régional...
  • comme une commune (ou un ensemble de communes) risque à un moment de ne plus pouvoir financer ce type d'installation, c'est le risque de la privatisation et des fuites de données qui se profile.

Quiconque visite la région ne peut qu'être surpris par l'omniprésence de ces panneaux bleus dans les moindres hameaux, sur des bâtiments publics... C'est simple : toutes les communes ou autres collectivités percevant une subvention de plus de 7 500 € se voient imposer un de ces panneaux avec la couleur, le logo (pas encore le portrait de Lolo) de la Région.

Et tout cela est très réglementé par le service de communication de la région : le bleu (très semblable à celui utilisé lors de ses campagnes électorales), la taille ("la dimension du logo Région est identique à celle du plus grand des autres logos")...

Ses concurrents politiques et de simples citoyens contestent cette autopromotion permanente : une conseillère régionale et députée LREM de l'Ain est allée devant le Tribunal administratif en mai 2021 (avant les dernières élections régionales. Mais elle a été déboutée, semble-t-il car son recours était plus large et pas assez documenté. Une pétition humoristique a été lancée (... 6 signataires), des questions posées (sans réponse)... Ainsi va la démocratie face au seigneur des panneaux !

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