Le scoop de Disclose (voir ci-dessous) sur l’usage illégal d’un logiciel de reconnaissance faciale par la police nationale a provoqué une réaction immédiate de la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés) mercredi 15 novembre, ainsi que de politiques. Celle-ci a déclenché une "procédure de contrôle" du ministère de l’intérieur. A SUIVRE
Le site Disclose nous révèle que, depuis 2015, la police nationale est équipée de Vidéo Synopsis (produit par Briefcam, société israélienne), un logiciel d’analyse d’images de vidéosurveillance qui permet l’emploi de la reconnaissance faciale.
Cet outil "permet de traquer une personne sur un réseau de caméras grâce, par exemple, à la couleur de son pull. Il peut également suivre un véhicule à l’aide de sa plaque d’immatriculation ou examiner plusieurs heures de vidéos en quelques minutes". Le slogan de Briefcam, rachetée par le géant de la photo Canon en 2018 : "Transformer la vidéosurveillance en intelligence active".
Après un essai en Seine-et-Marne, dès 2017 ce logiciel a été déployé notamment dans le Rhône, le Nord, les Alpes-Maritimes, la Haute-Garonne... Il équiperait aujourd'hui la police municipale dans près de 200 communes, dont Nice bien sûr (emploi dont on peut discuter de l'efficacité), mais aussi dans la Loire à Roanne, en Isère à Moirans ( La Quadrature du Net l'ayant attaqué au TA), au Puy du Fou...
L'enquête de Disclose révèle aussi que ce logiciel de reconnaissance faciale serait activement utilisé, sans contrôle ni réquisition judiciaire, par la police judiciaire, les préfectures de police de Paris et Marseille, la sûreté publique et la gendarmerie nationale ....
« N’importe quel policier dont le service est équipé peut demander à recourir à Briefcam, en transmettant une vidéo ou photo » (Disclose).
Cela fait plusieurs années qu’à travers la campagne Technopolice, La Quadrature du Net, en lien avec des collectifs partout dans le pays, documentait l’usage illégal de la vidéosurveillance algorithmique (VSA) par les forces de police municipale. De fortes présomptions existaient quant à son utilisation par la police nationale, à présent c'est confirmé.
Nous pouvons nous interroger et nous inquiéter sur l'ampleur de son déploiement et sur sa future utilisation. Un article mentionne déjà que le logiciel de Briefcam sera bientôt installé à l’Assemblée nationale !
La loi JO 2024 a validé l'usage de la "vidéosurveillance augmentée" (VSA) depuis la coupe du monde de rugby 2023, pour les Jeux olympiques et paralympiques de Paris et jusqu’au 31 mars 2025. Ceci dans les villes qui accueillent des épreuves dont fait partie la ville de Saint-Étienne.
Mais elle autorise aussi lors des "manifestations sportives, récréatives ou culturelles" qui, "par leur ampleur ou leurs circonstances, sont particulièrement exposées à des risques d’actes de terrorisme ou d’atteintes graves à la sécurité des personnes". Une définition extensive qui permettra de la déployer partout en France pendant cette très longue période.
Il serait très facile de remplacer la VSA.
Théoriquement, la loi JO2024 interdit un recours complet à la reconnaissance faciale (qui permettrait la comparaison du visage avec ceux stockés dans les bases de données étatiques types TAJ ou TES), mais sont quand même repérés les "mouvements suspects", les "émotions"... Et surtout, Disclose précise qu'en quelques clics Briefcam peut être activé, de façon plus complète cette fois.
« L'organisation prochaine des Jeux Olympiques à Paris promet d'être un festival plus répressif que sportif ! » comme l'a noté Contre Attaque. Et pas qu'à Paris, pourrions-nous ajouter.
Et pourtant ces outils sont illégaux aux yeux de la loi.
Le site Technopolice rappelle que Darmanin lui-même reconnaissait - lors de l'examen de la loi JO 2024 - qu’il n’existait aucune base légale pour l’utilisation policière de ces technologies d’analyse automatisée. Le site précise que "le fait de collecter des données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende" (cf. art. 226-18 et -19 du code pénal). Par ailleurs, "tout·e fonctionnaire est tenu·e de signaler sur le champ une infraction dont il ou elle aurait connaissance au procureur" (article 40 du code de procédure pénale).
Enfin, Disclose explique que pour financer le renouvellement des licences Briefcam, "la hiérarchie policière a pioché dans le fonds concours drogue". Ce qui pourrait s’apparenter à du détournement de fonds publics.
Difficile de savoir ce qu'il adviendra du logiciel de Briefcam à présent que son utilisation est connue du public et de la CNIL.
Toutefois, avec ce nouveau scandale la reconnaissance faciale n'est plus seulement comme une menace, mais une réalité contre laquelle il nous faut impérativement résister !
Une réponse sur « Reconnaissance faciale illégale par la police depuis 2015 ! »
[…] des pays les plus techno-surveillés du monde et vend ses matériels partout dans le monde (voir l'affaire Briefcam, logiciel de reconnaissance faciale utilisé illégalement par la police française). Tout cela peut permettre à ses agents un pistage des opposant.es partout, d'où les conseils (en […]